L’homme se fait reconnaître de ses semblables par les actes dont il assume la responsabilité, c’est-à-dire le châtiment, caractéristique essentielle de l’idée de l’homme qui prévaut dans une société donnée.
Ce que le code pénal qualifie de criminel n’est pas seulement l’acte physique et matériel d’atteinte aux personnes. Le droit français organise les sanctions en fonction des peines encourues et non des faits eux-mêmes.
Trois niveaux de qualifications peuvent être invoqués : la contravention, le délit et le crime. Une infraction sera qualifiée de criminelle si la peine encourue est supérieure à 10 ans pour les personnes physiques. La peine criminelle est définie dans les articles 131-1 et 131-2 du code pénal français. Les crimes sont jugés par une Cour d’assises.
Cette distinction en fonction des peines et non des qualifications peut permettre un choix pour le ministère public, à savoir, cour d’assises ou tribunal correctionnel. Dans un certain nombre de cas, il suffit de retenir ou d’ignorer les circonstances aggravantes pour modifier la qualification de crime ou de délit et donc la juridiction compétente. Les vols simples sont des délits, alors que des vols avec usage ou sous la menace d’une arme sont qualifiés de crimes.
On peut distinguer plusieurs catégories de crimes selon leur degré de gravité :
les crimes contre les personnes : viol, torture, esclavage, meurtre, génocide, crime contre l’humanité, etc.
les crimes contre les biens : vol avec violence aggravée, etc.
les crimes contre l’État : complot, attentat, atteinte à la sûreté de l’État, intelligence avec une puissance étrangère, trahison, espionnage, etc.
Depuis ces vingt dernières années, il existe de nombreuses situations dans lesquelles l’usage même de l’Internet peut constituer un crime. Il s’agit en particulier du cadre de ce que l’on qualifie de cybercriminalité et qui est un agencement de trois facteurs : le contenu consulté (l’usage par nature), le moyen de commettre un infraction distincte, la finalité (atteinte à un Système de traitement automatisé de données).
La lutte contre la cybercriminalité est une véritable priorité mondiale et les moyens mis à la disposition des États ne peuvent en aucun cas endiguer le fléau que représente cette menace.
D’un point de vue psychologique, que pourrions-nous dire de ce qui caractérise le crime numérique ?
En tout premier lieu, nous pouvons évoquer le sentiment d’impunité. Prenons comme point de départ l’infraction liée au contenu, à sa licéité. Si certains contenus illicites réclament une véritable recherche, voire même certaines investigations, d’autres sont classiquement proposés par les moteurs de recherche ou les réseaux peer to peer (Torrent, Magnet…). Bien que particulièrement surveillés depuis une dizaine d’année, les réseaux aux contenus pédopornographiques circulent encore. Le code pénal est extrêmement précis à ce sujet :
Le fait, en vue de sa diffusion, de fixer, d’enregistrer ou de transmettre l’image ou la représentation d’un mineur lorsque cette image ou cette représentation présente un caractère pornographique est puni de trois ans d’emprisonnement et de 45000 euros d’amende. La tentative est punie des mêmes peines.
Le fait d’offrir ou de diffuser une telle image ou représentation, par quelque moyen que ce soit, de l’importer ou de l’exporter, de la faire importer ou de la faire exporter, est puni des mêmes peines.
Les peines sont portées à cinq ans d’emprisonnement et à 75000 euros d’amende lorsqu’il a été utilisé, pour la diffusion de l’image ou de la représentation du mineur à destination d’un public non déterminé, un réseau de télécommunications.
Le fait de détenir une telle image ou représentation est puni de deux ans d’emprisonnement et 30000 euros d’amende.2
Cet article du code pénal laisse en suspens une question importante, celle de l’intentionnalité de l’internaute3 car en réalité, c’est cette dernière qui est jugée. En effet, s’il est impossible de condamner un internaute pour l’usage qui est fait de l’outil Internet, c’est-à-dire la consultation, il faut alors dissocier l’acte de consulter de la qualité de l’information consultée, ce qui implique que le fait de cliquer sur un lien a valeur d’intention et de pré-connaissance du contenu. Cette impasse décrit la difficulté de se départir de la notion de crime de sa factualité pénale. Plus encore, c’est cette extension de la limite de l’intimité qui est ici questionnée. Naviguer sur Internet est-il un acte privé ? Et si oui, privé en quoi ?
1 – Lacan, Autres écrits, DU SEUIL., Paris, Seuil, 2001, p. 121
2 – Article 227-23 du code pénal
3 – La cours de cassation aura statué sur ce point en distinguant la consultation de la détention par son arrêté du 08 juin 2003.